Le Parcours De la FIV : Comment Les Traitements de Fertilité Influencent-Ils la Connexion Emotionnelle du Couple?
Par Dre Arielle Buch-Frohlich, psychologue et spécialiste en thérapie individuelle et de couple.
Lorsque les couples commencent un traitement de fécondation in vitro, ils entrent souvent dans un univers plein d’espoir et de souffrances. C’est un parcours jalonné de rendez-vous, de procédures et d’émotions profondes, qui sont souvent ressenties différemment par chaque membre du couple. En tant que psychologue spécialisé en thérapie de couple, j’ai souvent été témoin de la manière dont ce parcours peut mettre à l’épreuve même les relations les plus solides — mais aussi de la façon dont il peut devenir une occasion de croissance, de résilience et de reconnexion émotionnelle.
Le tourbillon émotionnel de la fécondation in vitro
La FIV est bien plus qu’un processus médical : c’est une expérience émotionnelle et relationnelle. Vu de l’extérieur, la parcours peut ressembler à une série d’étapes cliniques : injections d’hormones, prélèvement d’ovules, fécondation, transfert d’embryons. Mais dans la vie du couple, chacune de ces étapes est chargée d’espoirs, de vulnérabilité, de peurs et, souvent, de déceptions répétées.
Ce qui me frappe le plus souvent, c’est à quel point chaque partenaire peut vivre le parcours de la FIV différemment. L’un subit les procédures physiques, et ressent quotidiennement les effets des changements hormonaux, des injections et des tests invasifs. L’autre peut se sentir impuissant, ne pas savoir comment aider ou se rapprocher, ou craindre de dire ou de faire ce qu’il ne faut pas.
Cette situation peut conduire à une souffrance silencieuse. La personne qui affronte la procédure physique peut se sentir invisible ou incomprise. L’autre peut se sentir exclue ou coupable. Quand le dialogue s’efface, on peut rapidement avoir l’impression d’être seul(e), même en couple.
Stress et tensions dans la relation
La FIV peut également devenir un véritable calvaire. Les rendez-vous médicaux rythment les journées, le vocabulaire de la fertilité s’invite dans le quotidien, et l’intimité passe d’un élan spontané à des rapports planifiés… ou même à l’évitement. Des conversations autrefois spontanées peuvent désormais se limiter à des questions logistiques ou axées sur le résultat. Pour beaucoup, la sexualité devient clinique, chronométrée et sous pression, supprimant la proximité émotionnelle que l’intimité physique apportait auparavant.
La pression financière est un autre facteur souvent sous-estimé. La FIV représente un coût important, surtout lorsqu’elle doit être répétée. Cela peut entraîner des tensions financières, de la planification ou des décisions — surtout si les partenaires ne s’entendent pas sur les limites.
Et puis il y a le deuil. Chaque tentative ratée est ressentie comme une perte. Il n’est pas rare que l’on passe de l’espoir au désarroi, encore et encore une fois, sans prendre le temps de faire le point. Sans espace commun pour le deuil, les couples risquent de vivre leur deuil en parallèle plutôt qu’ensemble.
Se retrouver dans le parcours
Malgré les épreuves, la FIV peut aussi devenir un moment de profonde connexion émotionnelle — si le couple parvient à rester uni malgré les turbulences. Cela ne signifie pas éviter la douleur ou faire semblant d’être positif. En réalité, c’est souvent l’inverse : laisser de la place à la tristesse, valider les sentiments de l’autre et apprendre à rester présent l’un pour l’autre, même lorsque les émotions sont à vif.
Je dis souvent aux couples qu’il est normal de vivre la FIV différemment. Vous n’avez pas à ressentir les mêmes choses au même moment pour rester unis — l’important, c’est de cultiver un espace où chacun peut exprimer ce qu’il vit en toute sécurité. Cela peut vouloir dire : « J’ai peur », « Je me sens exclu » ou « Je ne sais pas comment te soutenir comme je le voudrais ».
Les couples qui traversent avec succès les traitements de fertilité développent souvent un langage commun autour de la vulnérabilité. Ils font place à la fois au chagrin et à l’espoir. Ils apprennent à se voir à nouveau, non seulement comme deux partenaires dans un parcours médical, mais comme deux êtres humains traversés par la douleur, le chagrin, le désir et l’amour.
Deux façons de préserver le lien émotionnel pendant un parcours de FIV
1. Prenez le temps de faire le point sur vos émotions, pas uniquement sur les rendez-vous médicaux.
Avec la FIV, les rendez-vous et les résultats médicaux prennent vite toute la place. Prenez volontairement un moment à chaque semaine pour vous parler de ce que vous ressentez. Ce moment n’a pas pour but de résoudre quoi que ce soit. Il s’agit plutôt de prendre le temps de demander : comment tu vas, vraiment? Qu’est-ce qui a été difficile cette semaine? Qu’est-ce que je peux faire pour toi? Sans jugement. Sans conseils. Juste une écoute attentive et respectueuse. Même une quinzaine de minutes de dialogue authentique peut suffir à vous recentrer l’un sur l’autre.
2. Préservez les moments de joie et de normalité.
Les traitements de fertilité peuvent facilement prendre toute la place dans votre vie. Prenez soin de vous accorder du temps pour des moments qui n’ont rien à voir avec la FIV : une marche au parc, un épisode de votre série préférée, cuisiner à deux, s’évader le temps d’un week-end — même pour quelques heures seulement. Ce ne sont pas des distractions, mais des gestes essentiels pour préserver votre équilibre émotionnel. La joie permet au couple de rester connecté à ce qui, dans leur relation, dépasse le cadre de la fertilité. C’est un rappel que vous êtes bien plus qu’un protocole de traitement : vous êtes partenaires, complices, amoureux, une véritable équipe.
Les traitements de fertilité — en particulier la FIV — peuvent susciter un sentiment d’isolement, d’incertitude et une grande charge émotionnelle. Mais les couples ne sont pas obligés de vivre cela en silence. Avec de l’attention, de la bienveillance et de la détermination, il est possible non seulement de traverser ce parcours, mais d’en ressortir plus à l’écoute, plus unis et plus résilients en tant que couple.
Si vous êtes en plein cœur de ce parcours et que vous cherchez du soutien, sachez que vous n’êtes pas seul. À la Clinique Anna & Salomon, notre équipe propose une psychothérapie qui tient compte des répercussions émotionnelles et relationnelles des traitements de fertilité. Ensemble, nous aidons les couples à rester unis au cœur d’un cheminement à la fois difficile et profondément transformateur.